LE CANARD ENCHAÎNÉ 9 "Aux quatre coin-coins du Canard"
1986, GABRIEL MACÉ, rédacteur en chef du Canard Enchaîné.
Gabriel Macé accueillait toujours l’équipe du tournage du film « Aux quatre coin-coins du Canard » avec gentillesse et courtoisie.
J’avais appris qu’il aimait les animaux et qu’il possédait plusieurs dizaines de chats, des chiens et même des tortues. Je pensais donc qu’il serait amusant de présenter le rédacteur en chef du Canard Enchaîné au milieu de ses animaux.
Je proposais l’idée à Gabriel Macé qui acceptait tout de suite une rencontre dans le jardin de sa maison de Colombes, dans la région parisienne.
La première séquence a donc été tournée sur les escaliers de l’entrée. Il a suffit que madame Macé apporte de la nourriture et que Gabriel Macé appelle ses chats pour que tous viennent se rassembler autour de lui.
La suite du tournage s’est passée autour d’une table du jardin. Gabriel Macé nous avait prévenu qu’il n’aimait pas trop parler et qu’il préférait écrire, mais il était d’accord pour nous raconter son arrivée au Canard.
Pour le mettre à l’aise je lui proposais de lire les premiers poèmes qu’il avait envoyés au Canard. Il le faisait avec plaisir.
Il nous parlait ensuite de sa scolarité à Périgueux, de son enseignement comme professeur d’anglais à Sarlat, de sa participation au journal satirique L’Essor de Périgueux pendant l’Occupation, en 1944, et surtout de ses débuts dans la presse parisienne.
C’est grâce à Jean-Paul Lacroix, son ami journaliste de Périgueux, qu’il put entrer au Canard Enchaîné en 1947.
En 1986, au moment du tournage, il était l’un des plus anciens journalistes du Canard et il revendiquait son esprit anarchiste, ce qui nous plaisait particulièrement.
Roger Fressoz, le directeur du Canard Enchaîné le décrivait ainsi: « Merveilleux journaliste, il excellait dans tous les genres : billettiste, éditorialiste, conteur, poète, fabuliste, critique de théâtre et de télévision, reporter avec un art inimitable pour transformer ses voyages autour du monde en voyages autour de sa chambre. »
En 1969, il avait été choisi comme rédacteur en chef et il s’occupait surtout des pages culturelles. Il nous déclarait: « Il n’y pas moins rédacteur en chef que moi »
Gabriel Macé, Alain Grandrémy, Roger Fressoz, Erik Emptaz
Il faut reconnaître que Gabriel Macé n’incarnait pas l'homme d’autorité. Mais son attention aux autres, son ouverture d’esprit, sa générosité, sa bienveillance inspiraient le respect. Toute la rédaction du Canard lui témoignait une affection sincère.
Le tournage de l’entretien se terminait avec une tournée de whisky, dans la bonne humeur et avec le projet de se retrouver bientôt dans les locaux du Canard.
Le décès de ce personnage humaniste et libertaire, en 1990, m’a beaucoup peiné.
photos © Bernard Baissat