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17 mai 2020

NOUS SOMMES EN GUERRE, jour 62

NOUS SOMMES EN GUERRE, jour 62 ( 17/05/2020 )

 

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GILETS JAUNES. Ils sont de retour, les gilets jaunes, à Toulouse et à Montpellier notamment. Ils avaient interdiction de manifester. Les forces de l’ordre étaient plus nombreuses que les manifestants. Des arrestations, parfois violentes, ont eu lieu alors que les gilets jaunes s’étaient réunis par groupes de dix en respectant les distances sanitaires. Il faut donc noter que la colère des gilets jaunes existe toujours et que le gouvernement pense pouvoir y répondre par la répression. Alors que dans de nombreux pays européens des manifestations d’opposants aux autorités  se sont déroulés sans difficultés on comprend que le gouvernement français est dépassé par la situation qu’il a imposée aux citoyens. 

Les citoyens commencent à exprimer à nouveau leurs désaccord. Ils désapprouvent les mesures absurdes du déconfinement, ils condamnent les sanctions injustes prises contre des fonctionnaires et ils tentent de s’organiser comme en témoigne le texte «  Se fédérer » lancé par de nombreux militants.  

 

 Se fédérer

 

Nous sommes nombreuses, nous sommes nombreux : nous sommes tant et tant à penser et éprouver que ce système a fait son temps. Mais nos voix sont dispersées, nos appels cloisonnés, nos pratiques émiettées. Au point que quelquefois nous doutons de nos forces, nous succombons à la détresse de l’impuissance. Certes, parfois cette diffraction a du bon, loin des centralisations et, évidemment, loin des alignements. Il n’empêche : nous avons besoin de nous fédérer. Sans doute plus que jamais au moment où une crise économique, sociale et politique commence de verser sa violence sans faux-semblant : gigantesque et brutale. Si « nous sommes en guerre », c’est bien en guerre sociale. D’ores et déjà les attaques s’abattent, implacables : le chantage à l’emploi, la mise en cause des libertés et des droits, les mensonges et la violence d’État, les intimidations, la répression policière, en particulier dans les quartiers populaires, la surveillance généralisée, la condescendance de classe, les discriminations racistes, les pires indignités faites aux pauvres, aux plus fragiles, aux exilé-es. Pour une partie croissante de la population, les conditions de logement, de santé, d’alimentation, parfois tout simplement de subsistance, sont catastrophiques. Il est plus que temps de retourner le stigmate contre tous les mauvais classements. Ce qui est « extrême », ce sont bien les inégalités vertigineuses, que la crise creuse encore davantage. Ce qui est « extrême », c’est cette violence. Dans ce système, nos vies vaudront toujours moins que leurs profits.

 

Nous n’avons plus peur des mots pour désigner la réalité de ce qui opprime nos sociétés. Pendant des décennies, « capitalisme » était devenu un mot tabou, renvoyé à une injonction sans alternative, aussi évident que l’air respiré – un air lui-même de plus en plus infecté. Nous mesurons désormais que le capitalocène est bien une ère, destructrice et mortifère, une ère d’atteintes mortelles faites à la Terre et au vivant. L’enjeu ne se loge pas seulement dans un néolibéralisme qu’il faudrait combattre tout en revenant à un capitalisme plus « acceptable », « vert », « social » ou « réformé ». Féroce, le capitalisme ne peut pas être maîtrisé, amendé ou bonifié. Tel un vampire ou un trou noir, il peut tout aspirer. Il n’a pas de morale ; il ne connaît que l’égoïsme et l’autorité ; il n’a pas d’autre principe que celui du profit. Cette logique dévoratrice est cynique et meurtrière, comme l’est tout productivisme effréné. Se fédérer, c’est répondre à cette logique par le collectif, en faire la démonstration par le nombre et assumer une opposition au capitalisme, sans imaginer un seul instant qu’on pourrait passer avec lui des compromis.

 

Mais nous ne sommes pas seulement, et pas d’abord, des « anti ». Si nous n’avons pas de projet clé en mains, nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à théoriser, penser mais aussi pratiquer des alternatives crédibles et tangibles pour des vies humaines. Nous avons besoin de les mettre en commun. C’est là d’ailleurs ce qui unit ces expériences et ces espérances : les biens communs fondés non sur la possession mais sur l’usage, la justice sociale et l’égale dignité. Les communs sont des ressources et des biens, des actions collectives et des formes de vie. Ils permettent d’aspirer à une vie bonne, en changeant les critères de référence : non plus le marché mais le partage, non plus la concurrence mais la solidarité, non plus la compétition mais le commun. Ces propositions sont solides. Elles offrent de concevoir un monde différent, débarrassé de la course au profit, du temps rentable et des rapports marchands. Il est plus que jamais nécessaire et précieux de les partager, les discuter et les diffuser.

 

Nous savons encore que cela ne suffira pas : nous avons conscience que la puissance du capital ne laissera jamais s’organiser paisiblement une force collective qui lui est contraire. Nous connaissons la nécessité de l’affrontement. Il est d’autant plus impérieux de nous organiser, de tisser des liens et des solidarités tout aussi bien locales qu’internationales, et de faire de l’auto-organisation comme de l’autonomie de nos actions un principe actif, une patiente et tenace collecte de forces. Cela suppose de populariser toutes les formes de démocratie vraie : brigades de solidarité telles qu’elles se sont multipliées dans les quartiers populaires, assemblées, coopératives intégrales, comités d’action et de décision sur nos lieux de travail et de vie, zones à défendre, communes libres et communaux, communautés critiques, socialisation des moyens de production, des services et des biens… Aujourd’hui les personnels soignants appellent à un mouvement populaire. La perspective est aussi puissante qu’élémentaire : celles et ceux qui travaillent quotidiennement à soigner sont les mieux à même d’établir, avec les collectifs d’usagers et les malades, les besoins quant à la santé publique, sans les managers et experts autoproclamés. L’idée est généralisable. Nous avons légitimité et capacité à décider de nos vies – à décider de ce dont nous avons besoin : l’auto-organisation comme manière de prendre nos affaires en mains. Et la fédération comme contre-pouvoir.

 

Nous n’avons pas le fétichisme du passé. Mais nous nous souvenons de ce qu’étaient les Fédérés, celles et ceux qui ont voulu, vraiment, changer la vie, lui donner sens et force sous la Commune de Paris. Leurs mouvements, leurs cultures, leurs convictions étaient divers, républicains, marxistes, libertaires et parfois tout cela à la fois. Mais leur courage était le même – et leur « salut commun ». Comme elles et comme eux, nous avons des divergences. Mais comme elles et comme eux, face à l’urgence et à sa gravité, nous pouvons les dépasser, ne pas reconduire d’éternels clivages et faire commune. Une coopérative d’élaborations, d’initiatives et d’actions donnerait plus de puissance à nos pratiques mises en partage. Coordination informelle ou force structurée ? Ce sera à nous d’en décider. Face au discours dominant, aussi insidieux que tentaculaire, nous avons besoin de nous allier, sinon pour le faire taire, du moins pour le contrer. Besoin de nous fédérer pour mettre en pratique une alternative concrète et qui donne à espérer.

 

Dès que nous aurons rassemblé de premières forces, nous organiserons une rencontre dont nous déciderons évidemment ensemble les modalités.

 

Pour rejoindre cet appel : appelsefederer@riseup.net

 Premières et premiers signataires :

 Nicole Abravanel, Christophe Aguiton, Omar Aktouf, Franck Antoine, Sonia Anton, Jacky Assoun, Ludivine Bantigny, Philippe Barre, Rémi Bénos, Judith Bernard, Alain Bertho, Jacques Bidet, Stéphane Bikialo, Françoise Bloch, Françoise Boman, Thierry Borderie, Mathieu Borie, Benoit Borrits, Catherine Destom Bottin, Stephen Bouquin, Driss Boussaoud, Jacques Boutault, Sarah Boyé, François Brun, Pascal Buresi, Noëlle Burgi-Golub, Laurent Bussière Saint-André, Claude Calame, Pépita Car, Jean-Noël Castorio, Jean-Marc Cerino, Christian Celdran, Maureen Chappuit, Bernard Charlot, Luc Chelly, Yves Cohen, Marcel Cunin, Laurence D., Alain Damasio, Hugues Débotte, Laurence De Cock, Eric Decamps, Hervé Defalvard, Frédéric Delarue, Robert Descimon, Sophie Desrosiers, Serge D’Ignazio, Paul Dirkx, Marnix Dressen-Vagne, Jean-François Dubost, Frédéric Dufaux, Jean-Michel Dufays, Anne Dufresne, Jean-Paul Engélibert, Didier Epsztajn, Laurent Eyraud-Chaume, Guillaume Faburel, Patrick Farbiaz, Dimitris Fasfalis, Jean Fauché, Daniel Faugeron, Pascale Fautrier, Mathieu Fernandez, Renaud Fiévet, Marianne Fischman, Bernard Friot, Karën Fort, Fanny Gallot, Alain Gallucci, Edith Galy, Florent Gaudez, Franck Gaudichaud, Bertrand Geay, Jean-Pierre Gesbert, Pascale Gillot, Christophe Granger, Pascal Guillot, Elie Haddad, Jean-Marie Harribey, Benoît Hazard, Odile Hélier, Thierry Huve, Mathias Isimat-Mirin, Magali Jacquemin, Sylvain Jay, Anne Jollet, Claudine Katz, Marjorie Keters, Pierre Khalfa, Mohamed Khenniche, Jean-Luc Kop, Isabelle Krzywkowski, Anne Kubler, L’1consoloable, Francis Landron, Mathilde Larrère, Sylvie Larue, Stéphane Lavignotte,  Michelle Lecolle, Hervé Le Crosnier, Alain Lenud, Yann Leredde, Benoît Leroux, Wenceslas Lizé, Olivier Long, Camille Louis, Fanny Madeline, Christian Mahieux, Pascal Maillard, Jean Malifaud, Jean-Claude Mamet, Philippe Marlière, Killian Martin, Gilles Martinet, Gustave Massiah, Laurence Maurel, Julie Maurice, Éliane Meillier, Rémi Merindol, Denis Merklen, Henri Mermé, Isabelle Mestre, Stéphane Michot, Noufissa Mikou, Sylvain Milanesi, Sylvie  Monchatre, Ana Doldan Montiel, Mikael Motelica-Heino, Séverin Muller, Alain Munier, Philippe Nabonnand, Joël Nayet, Denis Orcel, Pierre Odin, Cléo Pace, Dominique Paturel, Frédéric Paschal, Willy Pelletier, Évelyne Perrin, Elsa Peyronne, Stéphane Pichelin, Francky Poiriez, Raphael Porteilla, Claude Pourcher, Pierre Prim, Claudio Pulgar-Pinaud, Isabelle Quaglia, Makan Rafatjou, Nelly Rintaud, Daniel Rome, Benoît Rougelot, Théo Roumier, Gilles Sabatier, Maria Eleonora Sanna, Pierre Sauve, Hélène Schneider, Michel Seigneuret, Pinar Selek, Marie Sellier, Alexandre Siguier, Patrick Silberstein, Alessandro Stella, François Ternynck, Jacques Testart, Edwige Thaille, Sylvie Thomas,  Véronique Tribouilloy, Julien Troccaz, Marc Tzwangue, Sixtine van Outryve, Patrick Vassallo, Sarah Vaucelle, Françoise Vergès, Frédéric Verhaegen, Julien Vigouroux, Pierre Vila, Pascal Vitte, Elise Voguet, Nicolas Voisin, Roger Winterhalter, Sylvie Wolf, Carole Yerochewski, Pierre Zarka, Élisabeth Zucker

 

Aggiornamento histoire-géo, ACU (Association des communistes unitaires), Cerises la coopérative, Changer de Cap, Collectif Droit à la Belle Ville, Collect'IF paille, Émancipation collective, Fédération des syndicats SUD-Rail, Gilets jaunes enseignement recherche, Jardins Communs, La Suite du monde, Le Paria, On prend les champs, PEPS (Pour une écologie populaire et sociale), Questions de classe(s), Union syndicale SUD Industrie

 

« ON N’EN VEUT PAS DE LEURS MEDAILLES ! »

 

Médaille

https://vimeo.com/418516450?1&ref=fb-share&fbclid=IwAR35bTLnJv-_Nt4VpiQbxA5MXzSQQlDGa4tjjzdd2by9YaiRjKoJvYnd89o

 

Site Reporterre: Priver les Français de nature, la société de contrôle jusqu’à l’absurde

14 mai 2020 / Gaspard d’Allens (Reporterre) 

Les deux mois qu’a duré le confinement, les Françaises et les Français n’ont plus pu sortir librement dans la nature. Et la menace de cette interdiction n’est pas dissipée. Cette politique a nécessité des moyens policiers démesurés, avec drones et hélicoptères, maltraitant les humains, qui ont un besoin vital d’accéder aux espaces naturels.

Pendant deux mois, les Français ont été privés de printemps. Assignés à résidence, les yeux collés aux écrans, ils ont été comme coupés du vivant. Depuis fin mars, plusieurs arrêtés préfectoraux ont interdit l’accès aux espaces naturels pendant toute la période du confinement. Finies les balades en forêt, les marches au bord de l’eau, le plaisir d’être dehors alors que les jours s’allongent et que la nature se réveille. Au nom de la lutte contre la pandémie, les Français ont été arrachés à leurs biens communs.

La situation se poursuit aujourd’hui. Avec le déconfinement, le littoral reste sous haute surveillance. Les bivouacs en montagne restent interdits en Savoie et en Haute-Savoie. Les parcs urbains et périurbains sont inaccessibles dans les départements classés rouge. Et ce qui a été ré-autorisé dans les départements verts reste incertain : par un décret publié le 11 mai 2020, le gouvernement permet aux préfets de réinstaurer à tout moment une réglementation identique à celle en vigueur pendant le confinement.

 

Dans les Hautes-Alpes.

À l’origine, ces mesures répondaient à l’urgence, à la nécessité d’endiguer, par tous les moyens possibles, la « vague » qui déferlait sur le pays. L’interdiction des espaces naturels et l’obligation de rester cantonné à un kilomètre de chez soi avaient le mérite de la simplicité. Ces dispositions étaient facilement applicables et contrôlables.

Et partout en France, les préfets ont serré la vis, dans une sorte de surenchère. Au total, plus d’une vingtaine de départements ont interdit explicitement l’accès aux espaces naturels. Dans la Meuse, les forêts ont été désertées, alors qu’elles représentent 37 % de la superficie du département. Les autorités y ont interdit les promenades, les cueillettes et la coupe de bois. Des activités jugées « non indispensables », même si nombre de personnes, localement, en tirent des ressources ou un moyen de chauffage.

« Au lieu de laisser la population se disperser en plein air, on l’a concentrée dans des zones réduites »

Dans le Cher, un département traversé de nombreux cours d’eau, le préfet a interdit de fréquenter les bords des canaux, des rivières, des étangs, des plans d’eau et des chemins de halage. « La course, seul, au bord d’un lac, n’est plus autorisée », expliquait Sylvie Berthon, sous-préfète de Vierzon, dans les colonnes du journal le Berry. Selon elle, cette initiative permettait de « freiner la propagation du Covid-19 en limitant fortement la circulation des personnes ».

Dans les Ardennes, c’est par Twitter que la préfecture a enjoint à la population de rester chez elle.

Encore bien trop de monde sur nos sentiers & le long de la voie verte ! @Prefet08 rappelle que l'accès aux parcs,  jardins municipaux, voies pédestres & cyclables, berges de canaux & cours d'eau, bases de loisirs, bois, forêts, sentiers de randonnées est strictement interdit !

En Haute-Savoie, les autorités ont même interdit de se déplacer à plus de 100 mètres de dénivelé de son domicile. « Une aberration », pour l’écrivain et alpiniste François Labande, également administrateur du Parc national des Écrins. « La préfecture méconnaît les reliefs de nos vallées, dit-il à ReporterreMême à moins d’un kilomètre de chez moi le dénivelé est plus important. Ces décisions sont inadaptées au milieu rural et à la montagne. Elles ont été imposées en bloc, sans discernement. »

Peu à peu, l’incompréhension a grandi devant ces mesures coercitives. « Une fois la sidération et le choc de l’épidémie passés, on s’est rendu compte que ces interdictions n’avaient aucune justification sanitaire », raconte Frédi Meignan, le président de l’association Mountain Wilderness ; « il ne s’agit pas d’appeler à faire n’importe quoi, du parapente ou de l’alpinisme, mais je ne vois pas en quoi se promener seul dans la nature pourrait accélérer la transmission du virus. »

Alors que le gouvernement enjoignait à la population de reprendre le travail, le contraste devenait saisissant à mesure que le confinement durait, entre les plages désertes et les métros bondés, les grandes surfaces saturées de monde et les forêts silencieuses. « Le virus circule d’abord dans des lieux confinés et denses. Au lieu de laisser la population se disperser en plein air, on l’a concentrée dans des zones réduites. C’est complètement absurde, s’emporte le professeur de santé publique et épidémiologiste Laurent Gerbaud. C’est sûr qu’il valait mieux que les gens restent dans les couloirs d’immeuble pour bien se contaminer les uns et les autres ! » ironise-t-il.

Dans un premier temps, les autorités ont justifié ces mesures en disant qu’elles permettraient de ne pas saturer les urgences. En réalité, « dans la majeure partie du territoire national, les urgences ont travaillé en sous-régime, à 60 % », relate Laurent Gerbaud. Par ailleurs, « se balader seul n’est pas de nature à inonder les services hospitaliers, dit l’accompagnateur en montagne Billy Fernandez. Sur environ 10 millions de pratiquants, la randonnée génère moins de 20 accidents mortels par an dans notre pays, alors que les accidents domestiques sont à l’origine de 20.000 morts chaque année. »

« Le gouvernement a voulu afficher un visage autoritaire »

Plusieurs professionnels de santé ont pris position. En plein confinement, l’influent président de la Fédération des médecins de France, Jean-Paul Hamon, a invité le gouvernement « à donner de l’air aux Français » sur Franceinfo.

Si on ne laisse pas aux gens un peu de respiration tout en respectant les mesures barrière, on va avoir des personnes qui vont se retrouver en burn-out, en complète dépression, parce qu’ils ne supportent plus le confinement. Et puis, on va avoir des problèmes de couple, avec des violences conjugales qui commencent à se produire. »

Contacté par Reporterre, le psychiatre Christophe André voit dans cette interdiction « un terrible gâchis. De nombreuses études scientifiques ont prouvé que l’accès à la nature renforce notre immunité. Cette situation est d’autant plus regrettable qu’elle renforce les inégalités sociales et fragilise les populations les plus vulnérables, qui n’ont pas accès à des jardins privatifs. L’accès aux espaces naturels, ce n’est pas du luxe ».

Les autorités n’ont pas pour autant lâché du lest. « C’est comme si après avoir échoué sur les tests, les masques ou les élections municipales, le gouvernement avait voulu afficher un visage autoritaire et sanctionner la population pour faire peser sur elle la responsabilité de ses erreurs », analyse le guide de montagne Billy Fernandez.

En effet, les flâneurs du dimanche et les randonneurs ont eu intérêt à bien se tenir. À travers le territoire, des moyens démesurés ont été déployés pour les « traquer ». Avec des hélicoptères, des drones, des moto cross, des 4x4, des quads, des patrouilles en VTT ou à pied… « Face au Covid-19, les gendarmes sont plus que jamais sur le terrain », titrait L’Essor, le journal de la gendarmerie. C’est le moins que l’on puisse dire.

Pendant le confinement, tous les deux jours, un hélicoptère a sillonné le ciel du Doubs, survolant ses prairies à vaches, ses forêts résineuses, ses villages au bord des rivières. Dans le massif des Trois-Pignons, à Fontainebleau (Seine-et-Marne), des motards de l’école de gendarmerie ont contrôlé les promeneurs chaque week-end. Un hélicoptère a aussi survolé la canopée. Dans le cockpit, un cavalier de la Garde républicaine orientait les gendarmeries mobile et départementale qui patrouillaient au sol.

Un hélico de la police suit une personne seule sur une plage pour lui annoncer au haut-parleur « La plage est interdite ! »
C'est sympa vos délires autoritaires pour faire respecter le #confinement mais en plus d'être inutile, ça coûte très cher et ça pollue énormément. #COVID19

Dans le Parc naturel des Ardennes, à l’île de Ré, dans la forêt de Bouconne à proximité de Toulouse, des drones avec des haut-parleurs ont aussi été utilisés. Dans la Meuse, à Verdun, une cellule drone a même été créée avec plusieurs télépilotes. « Le drone sert à aller dans des endroits où il n’y a pas de facilité d’accès avec nos véhicules, notamment les parcs », expliquait un gendarme au micro de France 3. La région Grand Est dispose de 18 drones de gendarmerie opérés par 30 télépilotes.

« L’appui de l’hélicoptère nous permet de couvrir rapidement de grands espaces »

Dans le parc naturel régional des Ballons des Vosges, un hélicoptère a également été de sortie.  « L’appui de l’hélicoptère nous permet de couvrir rapidement de grands espaces sur de grandes distances », indiquaient les militaires dansun autre reportage de France 3 Grand EstSamedi 4 avril, nous avons même repéré un vététiste au lac Blanc, que nous avons verbalisé. Il était parti de Colmar ! »

Contacté par Reporterre, le major du peloton de montagne de Xonrupt-Longemer (Vosges) explique avoir fait avec ses hommes « deux patrouilles par jour dans le parc naturel des Ballons des Vosges pendant toute la durée du confinement. En quad, en 4x4 ou a pied sur les sentiers de randonnées. Mais mis à part les chevreuils, les chamois et les lièvres, on n’a pas vu grand monde », confie-t-il.

La question des moyens se pose. À Chamonix (Haute-Savoie), pendant le confinement, la gendarmerie a utilisé à plusieurs reprises un hélicoptère qui sert d’ordinaire au secours en montagne. Le coût d’une heure de vol d’un Choucas 74 est évalué, selon la Cour des comptes, à plus de 3.000 euros. « Son recours doit être rationnel et obéir au principe de juste suffisance », écrivait la Cour dans un rapport de 2012.

Les rondes dans les airs se sont pourtant multipliées. Partout. Dans les Alpes, France 3 Haute-Savoie a même proposé à ses téléspectateurs d’admirer depuis le ciel, « les belles images du contrôle du respect du confinement » prises par les gendarmes. Sur Twitter, les militaires ont aussi lancé le quiz « Reconnaîtrez-vous le sommet survolé dans cette vidéo ? »

Embarquement avec les @Forcesaeriennes à bord de #Choucas74 pour s'assurer du respect des mesures de confinement et de l'arrêté préfectoral d'interdiction de fréquentation de la montagne.  #Quizz Reconnaîtrez vous le sommet survolé  #RestezChezVous

Sur la Côte Bleue, dans les Bouches-du-Rhône, le constat est identique. La surveillance des espaces naturels a nécessité des moyens démentiels. 60 % du temps des gendarmes de la compagnie d’Istres a été consacré à ces missions. Embarqué à bord d’un hélicoptère Écureuil, un journaliste de la Provence a raconté la poursuite des « récalcitrants au confinement ». On s’y croirait.

À quelques centaines de mètres du Rouet, un jogger s’époumone sur les hauteurs du vallon de l’Aigle. Le jogger se sent seul au monde, alors qu’il est passé sans le savoir entre les mailles du filet tendu par les gendarmes. L’hélicoptère le rattrape (…) Les gendarmes ont déployé les grands moyens, ce week-end. Des unités du [PSIG | Peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie], des gendarmes mobiles, des motards et des gendarmes mobiles sont venus prêter main-forte aux brigades territoriales. On croisera même des cavaliers de la Garde républicaine, en détachement pour arpenter le littoral sur leurs montures, tandis qu’au large, deux vedettes de la gendarmerie maritime et de la brigade nautique traquent d’éventuels plaisanciers. Un “show of force”, diraient leurs camarades de l’armée de l’air.

 

Reporterre a interrogé le ministère de l’Intérieur pour savoir combien avaient coûté ces dispositifs de surveillance au sein des espaces naturels et s’ils avaient été efficaces. Le ministère a répondu qu’il ne souhaitait pas transmettre ces informations.

Même fin de non-recevoir pour le photojournaliste et alpiniste Guillaume Vallot, dans le massif du Queyras (Hautes-Alpes). Excédé par le vol continu des hélicoptères et des drones dans sa vallée, il a posé plusieurs questions aux autorités, restées elles aussi sans réponse.

Je ne suis pas un libertaire acharné mais criminaliser des randonneurs, ça dépasse la limite du bon sens. Si on est en guerre, on doit avoir une gestion de l’effort de guerre qui doit être intelligente. Fliquer la montagne, faire la traque à de pauvres promeneurs et choper un ou deux contrevenants, ce n’est pas concevable, au niveau des moyens.

« Le gouvernement infantilise la population. C’est très français. En Suisse, la situation est différente »

Le philosophe Dominique Bourg parle, lui, de « dérive policière » : « Le gouvernement infantilise la population. C’est très français. En Suisse ou en Allemagne, la situation est complètement différente, les espaces naturels ne sont pas interdits. On demande juste aux gens de respecter les gestes barrière et les mesures de “distanciation sociale”. »

La France a préféré mettre en place « la société de vigilance » chère à Emmanuel Macron. La surveillance de tous par tous. Pour contrôler les espaces naturels, le gouvernement a mobilisé les fonctionnaires de l’Office français de la biodiversité et de l’Office national des forêts, aux côtés des forces de l’ordre. L’idée a fait polémique en interne.

« On n’est pas là pour faire de la police sanitaire, nous ne sommes pas assermentés pour ça, témoigne Patrick Saint-Léger, du Syndicat national de l’environnement. Pendant le confinement, les agents ont été très frustrés, d’un côté, on nous réquisitionnait pour contrôler le chaland. De l’autre côté, on ne pouvait pas faire nos missions environnementales. »

Début avril, le préfet de Seine-et-Marne a même tenté d’engager les chasseurs pour contrôler les promeneurs dans la forêt de Fontainebleau et les transformer en auxiliaires de police. Face au tollé, il a préféré abroger son arrêté.

 

Sur change.org, une pétition a recueilli plus de 158.000 signatures pour un accès responsable à la nature en période de confinement. La semaine dernière, la députée Delphine Batho a également déposé un amendement au cours du débat sur la loi prolongeant l’état d’urgence sanitaire. Mais il a été retoqué par le gouvernement, qui y voyait « un mauvais signal » et le risque d’un « appel d’air ».

Jean Castex, coordinateur national à la stratégie du déconfinement auprès de l’exécutif, déclarait que « la réouverture des plages serait une tentation ».

Dans une réponse adressée aux pétitionnaires, la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, leur a prescrit de continuer « leur sacrifice ».

« Le gouvernement n’a pas pris la mesure de l’importance de l’accès à la nature. Ce n’est pas seulement une question de loisir ou de sport, c’est un impératif de santé publique, une nécessité vitale », explique l’ancienne ministre de l’Environnement Delphine Batho. « Cette interdiction est le fruit d’une technobureaucratie vivant elle-même éloignée de la nature », dit-elle à Reporterre.

Pour le philosophe Dominique Bourg, cette position reflète,en effet, le rapport à la nature des gouvernants :

Pour eux, ça n’existe tout simplement pas. Ils vont d’une berline à un bureau climatisé en portant des dossiers. Leur sensibilité aux espaces naturels équivaut au néant. Édouard Philippe est un ancien lobbyiste d’Areva. La nature, c’est du capital qu’on exploite ou qu’on détruit. Elle sert à faire des babioles. J’aimerais les voir faire un stage de vie en milieu sauvage pour qu’ils apprennent à embrasser les arbres ! »

 

EDUCATION NATIONALE:

 

 Nous apprenons ce jour avec stupéfaction que Jean-Pierre Dubois, professeur des Universités, spécialiste de droit constitutionnel et Président d’honneur de la Ligue des Droits de l’Homme, a été suspendu de ses fonctions jusqu’au 31 juillet.

 Cette décision de la Présidente de l’Université Paris Saclay lui a été signifiée alors même qu’il s’apprêtait à participer aux délibérations du jury de première année de droit, où il est en charge de l’enseignement du droit constitutionnel, et sans qu’il ne lui soit jamais permis de s’expliquer.

 Motivée par une prétendue « urgence », cette décision n’est pas acceptable. Elle l’est d’autant moins que, compte tenu du départ à la retraite de Jean-Pierre Dubois le 1er septembre prochain, aucune procédure disciplinaire lui permettant de faire valoir ses droits ne pourra jamais être engagée. La fin d’une carrière de 45 années au service de l’enseignement supérieur et de la recherche restera ainsi marquée de cette opprobre.

 Qu’est-il en effet reproché à ce professeur ? D’avoir mal utilisé une plateforme informatique destinée aux examens dématérialisés, opération qui aurait permis « à une large majorité d’étudiants » d’obtenir d’excellents résultats. Il y aurait là un « manquement à ses obligations professionnelles » et une « infraction pénale ».

 Ces qualifications sont infamantes et par là même disqualifient la mesure prise à l’encontre de notre collègue.

 Nous protestons vigoureusement contre cette mesure de suspension prise à l’encontre de Jean-Pierre Dubois, dont l’intégrité scientifique et professionnelle n’est plus à démontrer.

 Nous en demandons le retrait immédiat.

 A défaut de quoi, ceux d’entre nous qui sont concernés envisagent de ne plus participer aux sessions d’examen dématérialisées en cours dans de nombreuses universités ; dès lors que nous sommes tous susceptibles d’encourir le même type de sanctions par l’utilisation de plateformes informatiques complexes et souvent défaillantes.

 La contradiction entre les invitations à l’« extrême bienveillance » vis à vis des étudiants émises par la Présidence de l’Université Paris Saclay, les remerciements ministériels émus à la communauté universitaire pour la « continuité pédagogique » assurée dans l’état d’urgence sanitaire, et le choix de l’acte d’autorité éclate.

 Nous refusons la caporalisation technocratique des Universités qui s’affiche ici au grand jour. Elle repose sur un état d’exception dont la mise en œuvre fébrile menace gravement les libertés académiques.

 Premier.e.s signataires :

 Rafaëlle Maison, professeur, Université Paris Saclay,

 Emmanuelle Rio, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Bruno Viaris, Maître de conférences à l’Université Paris Saclay,

 Stéphane Boiron, Professeur à l’Université Paris Saclay,

 Jean-Eric Callon, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Raphaël Brett, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Raphaël Paour, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Aude Farinetti, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Stéphane Lavigne, Maître de conférences, Université Paris Saclay

Nathalie Goedert, Maître de conférences à l’Université Paris Saclay,

 Sylvie Barrault, Maître de conférences à l’Université Paris Saclay,

 Charles Vautrot-Schwarz, Professeur à l’Université Paris Saclay,

 Frédéric Rolin, Professeur à l’Université Paris Saclay,

 Florence Poirat, Professeur à l’Université Paris Saclay,

 Christine Dilmann, Professeure à l’Université Paris Saclay,

 Michel Menou, Maître de conférences à l’Université Paris Saclay,

 Frédéric Restagno, Directeur de recherches, CNRS,

 Jean Bérard, Maître de conférences, ENS Paris Saclay,

 Jacques-Olivier Klein, Professeur, Université Paris Saclay,

 Stéphane Duroy, Professeur, Université Paris Saclay,

 Laurent Willemez, Professeur, Université Versailles Saint-Quentin,

 Hélène Gispert, Professeur émérite, Université Paris Saclay,

 Mélanie Lebental, Maître de conférences, Physique, ENS Paris Saclay,

Isabelle Bournaud, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Isabelle Bouchoule, Directrice de recherche, Laboratoire Charles Fabry,

 Frédéric Baudin, Astronome, Institut d’Astrophysique Spatiale,

 Emmanuel Blanchard, Maître de conférences en science politique, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines,

 Morgane Locker, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Tania Bizouarn, Chargée de recherche CNRS, Université Paris Saclay,

 Lydia Iconomidou-Fayard, Directrice de recherche CNRS, ICJLab,

 Henri Benisty, Professeur, IOGS,

 Benoit Blottin, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Isabelle Turbica, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Cécile Fairhead, Professeur, Université Paris Saclay,

 Elsa Baynard, Ingénieur d’études, IJCLab,                 

 Frédéric Coquelle, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 André Didier, Service financier, IUT Cachan, CGT Paris Sud,

 Olga Mamoudy, Professeur, Université Polytechnique des Hauts de France,

 Anne Schuhl, Directrice de recherches CNRS, retraitée, élue CESFO,        

 Karine Alix, Professeure, AgroParisTech,

 Odile Join-Lambert, Professeure, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines,

 Bruno Palpant, Professeur, CentraleSupélec, Université Paris Saclay,

 Christophe Hecquet, Ingénieur de recherche CNRS, Laboratoire Charles Fabry,

 Frédéric Lebaron, ENS Paris Saclay,

 Noé Wagener, Professeur, Université de Rouen-Normandie,

 Marie-Andrée Merrer, Service relations internationales, IUT Cachan,

 Isabelle Guénal, Professeur, Université Versailles Saint-Quentin,

 Anne-Marie Pret, Professeur des Universités, Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines,

 Yves Levi, Professeur, Faculté de pharmacie, Université Paris Saclay,

 Arne Keller, Professeur, Physique, Université Paris Saclay,

 Cécile Quantin, professeure, Université Paris Saclay, Présidente du département des sciences de la Terre, élue SUD Education CTU,

 Olivier Plantevin , Maître de conférences, Université Paris Saclay, secrétaire CHSCT Université Paris Saclay,

 Clarisse Hamadache, Maître de conférences à l'Université Paris-Saclay,

 Robert Pansu, Directeur de recherche, ENS Paris Saclay,

 Philippe Lesot, Directeur de recherche, CNRS,

 Adrien Fauve, Maître de conférences, Université Paris Saclay,

 Pierre Gérard, Maître de conférences, AgroParisTech,

 Filippo Rusconi, CNRS,

 Xavier Rognon, Professeur, AgroParisTech,

 Marc Cheneau, Chargé de recherche CNRS, Laboratoire Charles Fabry,

 Matthieu Sourdeval, Maître de conférences, Université Versailles Saint-Quentin

Orsay en lutte: www.orsayenlutte.info

> Lutte@orsayenlutte.info

 

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