MICHEL TUBIANA

Michel Tubiana, artisan de la paix

C'est, en 1990, lorsqu'il défendait le peuple kanak victime des violences coloniales de l'armée française que j'ai eu l'occasion d'apprécier le talent et la générosité de l'avocat Michel Tubiana. Il était aux côtés de Jean-Jacques de Félice, Jean Chesneaux, Alban Bensa dans l'association KANAKY SOLIDARITÉ et il faisait, le 22 janvier, un exposé anticolonial brillant, intitulé "La Nouvelle Calédonie dans l'espace politique français", dans le cadre du Comité de réflexion sur la Nouvelle Calédonie.

QUAND j'ai appris son décès, survenu le 2 octobre 2021, j'ai souhaité lui rendre hommage en mettant en ligne ses propos que j'avais filmés sur ma chaîne youtube.

Né à Alger en 1952, il arrive à Paris à l'âge de 11 ans quand sa famille quitte son pays à cause de la guerre. Il connaît ses premières expériences militantes en 1968. Il écrit : « Je participais beaucoup au service d’ordre… Il y a eu cette scène absolument mémorable quand on a attaqué le meeting d'Ordre Nouveau au Palais des Sports. »

En 1974, pendant ses études en droit, il découvre le MAJ [Mouvement d’action judiciaire] et fait la connaissance de Jean-Jacques de Félice, un des principaux animateurs.

Environ 2 ans après leur rencontre, de Félice présente Michel Tubiana à Henri Noguères, devenu Président de la Ligue des Droits de l'Homme . Ils sont plusieurs de cette génération à entrer dans l’organisation vieillissante, que Noguères veut faire évoluer. Proche de Jean-Jacques de Félice, par des défenses communes comme celles des comités de soldat, Michel Tubiana souligne la force des liens qui se tissent entre eux, malgré leurs différences : « entre le représentant de la "HSP" (haute société protestante) et le pied-noir, celui dont la non-violence était chevillée au corps et celui qui ne croyait pas au pacifisme. »

Investi avec Jean-Jacques de Félice dans des dossiers difficiles comme la défense de Klaus Croissant, avocat de la Fraction Armée Rouge Révolutionnaire réfugié à Paris en 1977, leur proximité se renforce encore quand de Félice lui propose de l'accompagner en Nouvelle Calédonie en 1984, pour défendre des kanaks. « Dans la salle des pas-perdus du Tribunal de Nouméa, Michel Tubiana est confronté à une dizaine de personnes qui viennent vers lui et, le reconnaissant comme le fils d’Armand Tubiana qu’ils ont connu en Algérie, lui disent leur surprise de le voir défendre les Kanaks – c’étaient des pieds-noirs venus s’installer en Nouvelle-Calédonie après la décolonisation… la première fois que je suis allé en Calédonie [à la fin des années 70], c’était une caricature de la magistrature là-bas, c’était une carte de la décolonisation française… Au fur et à mesure que les confettis de l’Empire disparaissaient. »

Jean-Jacques de Félice est vice-président de la LDH de 1983 à 1988.  Secrétaire général de la LDH entre 1984 et 1995, Michel Tubiana a succédé à Henri Leclerc à la présidence de l’association, entre 2000 et 2005, avant d’en devenir président d’honneur. 

C'est dans le bulletin du Comité pour la défense des Droits de l'Homme en Pays Basque Jakilea, que j'ai trouvé le titre de cet article : "Michel Tubiana, artisan de la paix". Il est écrit : « Michel Tubiana s'investit en 2009 dans la défense de la Chambre d'agriculture alternative Laborantza Ganbara, dont l'état refusait la création et dans la défense de la militante basque Aurore Martin, dont l'Espagne exigeait l'extradition. Ces dernières années, Michel Tubiana a joué un rôle essentiel dans le processus de paix basque, apportant ses conseils à Bake Bidea et se tenant aux côtés de la Délégation Pays Basque, lors de réunions tenues au ministère de la Justice sur la question des prisonniers. Il fut l'un des premiers Artisans de la Paix à l'origine du désarmement de l'ETA en avril 2017. Il se penchait encore dernièrement sur les dossiers des prisonniers basques privés de la liberté conditionnelle, à laquelle ils sont en droit d'aspirer, Jan Parot et Jakes Esnal, actuellement dans leur 32^e année de prison. »

La section de Bayonne de la LDH ajoute : « Clairvoyant et déterminé, Michel Tubiana, s'est engagé avant nous dans le processus de paix en Pays Basque. Il a été notre modèle, l'appui indéfectible de nos engagements. Joignant le geste à la parole, il est pour beaucoup dans le chemin déjà parcouru dans ce processus. Il restera notre boussole... C'est un honneur que d'avoir pu partager sa route ! »

C'est aussi un privilège pour les pacifistes d'avoir côtoyé un avocat qui prônait la décolonisation et le désarmement

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Michel Tubiana, La Nouvelle Calédonie dans l'espace politique français, Comité de Réflexion, Paris, 22 janvier 1990, 90 minutes, Réalisation Bernard Baissat

http://bbernard.canalblog.com/archives/2021/12/26/39277272.html

https://www.youtube.com/watch?v=PfuSe-Lk9ws