Michel Pourteyron est mort jeudi dernier, à l'âge de 72 ans (1). Peintre expressionniste en quête de lumière, il était devenu l'ombre de lui-même, enfermé dans sa tragédie depuis près de trois ans, anéanti moralement par la maladie, comme un enfant trahi. Il ne peindra plus dans cet atelier ordonné où trônait son « fauteuil de réflexion ». Dans lequel il aimait s'enfoncer, guettant le « passage de l'ange », l'inspiration, au milieu de ses objets familiers, dont cette cruche bleu Matisse offerte par son père.
Jean Giono séduitMais il n'était pas seulement cet être d'apparence volubile au tempérament trempé, aimant l'amitié et la fête. Sous la carapace du personnage haut en couleur, comme la matière sur ses toiles, se terrait un être inquiet, sensible, en quête d'absolu. Sa vie et sa peinture ne faisaient qu'un.
Jean Giono, séduit dans les années soixante par ce jeune homme authentique, comme Antoine Blondin plus tard, disait : « Pourteyron dessine avec la couleur. C'est du rapport des couleurs entre elles que surgissent les formes. [ ] De l'intelligence il ne garde que ce qui lui permet d'exprimer la sensation. [ ] Pourteyron est un artiste pur. »
C'est à Marseille, où il passa les vingt premières années de sa vie d'artiste autodidacte, que le fils du charcutier de Castillon-la-Bataille, né le 8 novembre 1938, a véritablement commencé sa carrière. Avant Giono et Lacouture, cependant, Michel Pourteyron n'oubliait pas de citer au panthéon de son amitié le Libournais Pierre Bernard, homme de culture et conseiller pédagogique à l'époque - lui aussi décédé -, qui convainquit sa « sainte mère » de l'envoyer, à 15 ans, à l'école des arts appliqués de Paris. Nous sommes en 1953.
Un artiste libreInfluencé par le groupe Cobra, le peintre expressionniste abstrait quitte plus tard la capitale pour la Provence. Giono, donc, le consacre. Sa carrière internationale est lancée. Il expose un peu partout dans le monde, du Brésil à New York, s'occupant lui-même de la vente de ses tableaux. Libre, déjà, toujours. Michel Pourteyron le fut. L'acte de peindre était pour lui un combat avec la matière, une « violence volontaire ».
En 2007, vingt ans après son retour au pays natal où il épousa la tendre Dany avec laquelle il partageait sa précieuse liberté, il mit sur pied une rétrospective, « 20 ans de création à Pujols », à Eysines. Tout ce que le peintre souhaitait à ce moment-là, « c'était d'atteindre la sobriété lumineuse ». C'était juste avant que la maladie n'étouffe sous son éteignoir funeste ce feu créateur qui l'animait et dont témoigne aujourd'hui son uvre.
(1) Les obsèques de Michel Pourteyron seront célébrées mardi, à 11 heures, en l'église de Castillon-la-Bataille.